La fondation Maeght à Saint-Paul de Vence, la Villa Arson à Nice
Picasso
J’avais 16 ans lorsque je remarquai dans un kiosque à journaux un magazine dédié à l’œuvre de Picasso. Instinctivement je me suis mis à le feuilleter ; il devait contenir une vingtaine de photos de tableaux qui montraient succinctement l’évolution de l’œuvre de l’artiste. Je fus frappé de voir que l’artiste avait aussi fait du figuratif ; ma surprise fut grande en voyant ses premiers tableaux, car dans mon imaginaire le peintre ne faisait que du moderne, que de l’abstrait.
Jusqu’alors je n’avais jamais vu un tableau figuratif de Picasso, car chaque article qui lui était consacré dans les divers journaux que j’avais eu l’occasion de lire, était illustré par des œuvres avant-gardistes qui classaient le peintre sans ambigüité comme l’inventeur de la peinture moderne.Dans ce magazine, dans lequel figuraient des œuvres représentant les diverses tendances dans lesquelles s’était illustré le maître, un tableau attira mon attention : c’était un autoportrait. Picasso s’y était représenté en T-shirt blanc et tenait une palette à la main. Il avait une tête têtue, un regard entêté, et semblait très attentif. Je trouvai qu’il ressemblait plus à un bagnard qu’à un artiste. Ce jour-là j’eus un coup de cœur et j’achetai le magazine avec mes maigres économies.Je l’ai encore, cinquante ans après.Même si les photos n’étaient pas d’une grande qualité, je m’amusais à distinguer les traces du pinceau, que je suivais attentivement ainsi que les tâches des couleurs, comment elles s’équilibraient, s’accommodaient entre elles.
Guernica, j’ai eu l’occasion de voir cette œuvre un peu plus tard plusieurs fois ; au Prado et plus récemment au musée Reine Sophie à Madrid – je ne sais pas si la mémoire me fait défaut mais j’ai l’impression de l’avoir vue aussi à la Fondation Maeght. Bref, au musée Reine Sophie pendant que j’auscultai l’œuvre, l’envie me vint de le copier et le faire en taille réduite afin de « l’accrocher » chez moi.Et ce ne fut que beaucoup plus tard que je finis par en dessiner et peindre le contenu. Mais un contenu en format « réaliste » plutôt qu’« abstrait. » Au final ça a donné 3 panneaux de contrecollé de 180×120 ; ce qui fait une fois les panneaux joints, un dessin de 180×360. Le tout au stylo bille noir, au crayon gris et avec de la peinture acrylique noire blanche et argentée.Tout ce laïus pour dire que c’est Picasso en particulier qui a fait naître en moi le désir de peindre. J’ai vu des œuvres de Picasso un peu partout en Europe, je suis allé au musée Picasso à Paris, à Antibes (en voisin), au musée Berggruen de Berlin, au musée Reine Sophie à Madrid… je dois en oublier A l’époque un détail m’amusa : il utilisait quelquefois du Ripolin… comme mon père, qui en ouvrier factotum dans le domaine de la construction s’en servait pour peindre des chaises, des persiennes et autres portes !
PS : Au musée Picasso d’Antibes j’y ai vu des œuvres de Nicolas de Staël exceptionnelles. Celle qui me frappa le plus, ce fut sans doute « l’orchestre, » cette grande fresque rouge (2mx3,5m) où l’on devine certains instruments entre lesquels se dressent une multitude de partitions posées sur des pupitres. Nicolas de Staël c’est comme un aimant, ça attire l’œil. C’est à voir ! Je vous conseille aussi de lire sa biographie : une épopée, peut-être son chef d’œuvre majeur !
Dali, la pêche au thon
Peu après ma « rencontre avec Picasso » j’ai eu l’occasion de voir un tableau qui me frappa par sa beauté, sa force et sa violence. Par la multitude des détails, les couleurs, les mouvements et attitudes des personnages et… par ses dimensions.C’était spectaculaire, monumental, tout s’accordait admirablement : les pêcheurs en action, les thons qui se débattaient, le sang qui se mêlait aux éclaboussures des vagues de la mer… On s’y serait crus ! Je me trouvais dans un hall de l’hôtel Negresco à Nice, planté devant « la pêche au thon » de Dali en me demandant quelle force divine avait guidé le peintre pour lui permettre de réaliser une telle œuvre. J’étais fasciné. Je ne me souviens plus pourquoi Dali était venu exposer ce tableau à l’hôtel Negresco de Nice. Je crois que c’était juste après qu’il eut terminé l’œuvre – le tableau devait être à peine sec ! C’était un peu avant sa fameuse pub sur le chocolat Lanvin en 68 : « je suis fou du chocolat Lanvin ! »
Un pote à moi avec qui je jouais au foot, un apprenti plombier ou électricien je ne sais plus, qui travaillait dans l’hôtel me parla de ce tableau sous la douche après un match. C’est lui qui me fit entrer (avec l’accord du gérant, enfin je crois) en douce dans l’hôtel afin que je puisse l’admirer.
J’ouvre une parenthèse pour dire deux mots sur Dali : pendant longtemps j’ai beaucoup aimé ses œuvres, mais cela ne dura pas. Et aujourd’hui j’aime lire d’avantage le titre de ses œuvres que de regarder ses œuvres elles-mêmes… qui au fil des ans cessèrent de m’étonner – ce qui ne fut jamais le cas avec Picasso.
Buñuel
Puisque je me réfère Dali, je me dois de parler de Buñuel. Ses films ont fortement marqué ma jeunesse et au fil du temps je ne l’ai jamais renié ou « abandonné » ; même si considérant son œuvre entière de cinéaste, j’aime davantage ses anciennes « pellicules » ; en particulier sa période Mexicaine et ses premières œuvres en France ; que celles qu’il a réalisées après la fin les années 60.
C’est mon côté nostalgique : j’aime le noir et blanc et ses mystères ; voir comment c’était en ce temps-là, comment étaient les gens, quelles étaient les mœurs de l’époque ; et voir cette bourgeoisie mise à mal par les caractères des personnages créés par Buñuel, c’est un vrai régal.
Je ressens aujourd’hui ses derniers films comme un peu ringards, un peu démodés aussi ; alors que ses vieux films ne le sont pas. Bizarre !
Bref, les films de Buñuel m’ont quelque peu inspiré. Et notamment « un chien andalou » qui m’avait impressionné lorsque je l’ai vu pour la première fois dans les années 70. En lisant des documents sur ce film j’ai appris que Buñuel et Dali étaient allés acheter une tête de vache aux abattoirs, l’avaient polie, maquillée et l’ont ensuite utilisée pour tourner la scène de « l’œil ».